La musique psychédélique ne mourra pas pour autant avec eux, intemporelle elle se réincarnera ça et là au sein d'autres textures musicales. Sur fond de révolution électronique elle resurgit d'abord en Allemagne au début des années 70. C'est l'avènement du krautrock incarné entre autre par Can, Neu! ou Kraftwerk. Animés d'un état d'esprit expérimental, ils composent leur musique sur des rythmiques hypnotiques lardées de motifs et de mélodies avec lesquels ils explorent les nouveaux pouvoirs offerts par la fée électronique.
Un peu plus tard, au beau milieu des années 80, le mouvement punk se voit peu à peu transcendé par toute une génération de psychotiques. Se reconnaissant dans l'esthétique glauque et minimale du punk, ils cherchent à explorer des horizons plus célestes en repoussant toujours plus loin les frontières de l'expérience psycho-acoustique. C'est armés de tout un arsenal de pédales d'effets héritées du progrès technologique et poussées à plein volume que la cold-wave, le post-punk ou encore un peu plus tard la dream pop et le shoegaze font leurs premières armes. De Joy Division à Spacemen 3, en passant par Cocteau Twins ou encore Jesus And Mary Chains, ils avaient tous pour influence commune de formidables précurseurs: citons pèle-mêle le Velvet Underground, le garage 60's primitif, le punk et le krautrock.
Si elle donne aujourd'hui l'impression d'opérer une forme de retour, la musique psychédélique n'a de fait jamais vraiment cessé d'exister, ne faisant que changer de formes et s'hybridant au fil du temps. C'est ainsi que des années 90 à nos jours on observe, emmené par une poignée de formations désormais cultes, une prolifération de groupes psychédéliques aux styles multiples et aux influences variées.
Il ne nous aura pas échappé de percevoir également les premiers écueils de la popularisation croissante de cette résurgence psychédélique, mouvement hétéroclite mais néanmoins en quête d'une certaine forme d'unité et qu'il faudra protéger des tentations spoliatrices et autres tentatives de corruption de la pieuvre Babylone.
L'industrie musicale, et le système plus généralement, recherchent perpétuellement à absorber les courants contre culturels, à s'en approprier les symboles afin de pouvoir vendre du "cool" dénaturé et vidé de toute substance spirituelle ou dissidente. Parce que sur un plan purement matérialiste cette substance est tout simplement superficielle, ou parce qu'elle représente parfois même un danger potentiel pour l'ordre et les monopoles en place.
Les exemples du passé nous le remémorent douloureusement. D'abord la culture hippie, cet authentique mouvement contestataire et spirituellement inspiré que le système a bien rapidement phagocyté pour ne laisser qu'au yeux des masses une poignée de clichés pastiches et un merchandising "made in China" bien portant. Puis le mouvement punk. Lui qui, intrinsèquement nihiliste, avait pris la relève du courant hippie, un peu comme la gueule de bois guette celui qui succombe aux joyeux excès d'une nuit festive. Lui qui s'était érigé en nouvelle mouvance anti-système, jetant ça et là les bases d'alternatives sociales et économiques sur fond de Thatcherisme, de chômage, de tensions et de misère sociale. Lui que le marché finira par vendre un peu plus tard comme vulgaire étiquette pour adolescent rebelle et en quête d'identité, en atteste la pénible déferlante de skate-punk américain des années 90 symbolisée entre autre par Blink 182 et Sum 41.
Si révolution psychédélique il y a, alors il sera d'autant plus intéressant d'observer sa capacité à s'unifier solidement et durablement autour de valeurs communes, dépassant continuellement son pur aspect esthétique, perpétuant sa richesse créative et ne cessant de construire une véritable alternative artistique et musicale en dissidence avec les circuits industriels mainstream. Parmi les initiatives et les choses intéressantes qui émergent, au delà du récent bourgeonnement planétaire de Psych Fests aux line-up toujours plus touffus et aux prix plus qu'abordables, on notera la formation de collectifs soudant certains acteurs du mouvement: les collectifs Nøthing et Sons Of Confusion notamment, dont la plupart des groupes ont été évoqué dans notre précédente édition Frenchedelia, l'excellent travail de labels indépendants tels Cranes Records, Howlin Banana Records ou Born Bad Records pour ne citer qu'eux, et l'organisation de soirées psychédéliques croisant la scène locale à l'internationale, citons pour exemple les Acid Test Party organisées par nos camarades du Jabberwocky Band à Rouen ou l'engouement croissant autour des soirées Psychedelic Revolution amorcées par les Sound Sweet Sound à Toulouse.
La série Frenchedelia se poursuit donc, et nous avons fait le choix de lui dédier un nouveau format. Alors que le dossier qui aura marqué sa genèse se présentait sous la forme d'un joyeux capharnaüm de 61 groupes jetés là pèle mêle, la suite s'organisera sous la forme de numéros un peu plus structurés et mettant en lumière des séries de 14 groupes.
Sans plus attendre nous vous laissons jeter un œil à l'addendum #1 d'une série qui ne fait que commencer !
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We've proclaimed it on many occasions and for many months after the publication of our Frenchedelia dossier, that exploring the flourishing French psychedelic scene was ultimately far from over. Our impetuous devotion made us engraved in our clay tablets the noble quest to keep on writing the next episodes. During these months we have wisely squandered time without counting the days, dragging our carcass from town to town and our mind from side to side. The opportunity to expand our musical research and take note of unfortunate oversights, but also to get in touch with crusade's fellows. The first edition of the Paris International Festival Of Psychedelic Music this year has been a highlight of the contemporary psychedelic movement in France, gathering faithful pilgrims from all corners of the hexagon around an international programmation drawing an interesting representation of the movement's diversity. After Levitation Festival of Angers it became the second French son of daddy Austin Psych Fest, reflecting a growing interest around this colorful psychedelic revival.
Today, undeniably the "psychedelic" epitaph brings together many different musical families, beyond the definition of a specific kind, "Psychedelia" rather reflects an ideological convergence in the design of the music. An ideology that could be summarized by the etymology of the term coined after an exchange of poems between the psychiatrist Humphry Osmond and Aldous Huxley:
"To make this trivial world sublime,
Take a half a gram of phanerothyme.
To fathom Hell or soar angelic,
Just take a pinch of psychedelic."
Psychedelic, "which reveals the soul." Psychedelia" assumes a mystical nature
and sees itself as an experience, a source of excitement for our psyche. And seeks to introduce itself merely wearing its original essence; dating back to ancient times, men from Paleolithic were already practicing this ancient art, a form of expression beyond language, where the acoustic vibrations and melodies express an emotion to which the rhythm gives life. This essence, the modern music progressively spoiled it, while becoming an industrial and standardized product. From art to absurdity, when the quality and the meaning were sacrificed on the altar of profitability.
So the first countercultural revolution of the twentieth century saw the emergence of the first pioneers of psychedelic music, which although helped by entheogen virtues of some immemorial psychoactive substances, have re-explored the spiritual and ecstatic flavors of music. They are, among several others, Roky Erickson, Brian Jones, Sky Saxon, Jimi Hendrix, Jim Morrison, Syd Barrett, Lou Reed, Don Van Vliet. From all of them, many are those who, eager for work, sadly passed away on heavy deadly overdrives. Peace to their souls.
Psychedelic music did not die with them so far, timeless it has reincarnated here and there in other musical textures. Against a background of electronic revolution, "Psychedelia" showed up the face again in Germany in the early 70s. It was the birth of krautrock incarnate among others by Can, Neu! or Kraftwerk. Fuelled by an experimental mindset, they composed their music on hypnotic rhythmic streaky patterns and melodies with which they explored the new powers afforded by electronic fairy.
A little later, in the middle of the 80s, the punk movement was seen gradually transcended by a whole generation of psychotics. Identifying themselves with the creepy and minimal aesthetic of punk music, they have sought to explore more celestial horizons continually pushing the boundaries of the psycho-acoustic experience. Armed with an arsenal of effects pedals, legacy of technological progress, all knobs turned to maximum. It is how cold-wave, post-punk, later dream pop and shoegaze got their start. From Joy Division to Spacemen 3, through Cocteau Twins or Jesus And Mary Chains, they all had the common influence of great precursors, pell-mell: The Velvet Underground, primitive 60's garage, punk and krautrock.
If today it feels like it comes back, psychedelic music has in fact never really left us, merely changing forms and hybridizing over time. Thus, from the 90s to the present day we observe, led by a handful of now-cult bands, the proliferation of modern psychedelic bands with many styles and diverse influences.
We also see the first pitfalls of the growing popularity of this psychedelic resurgence, which is still a heterogeneous movement seeking some form of unity and that we need to protect from predatory temptations and other attempts to bribe from the octopus Babylon.
The music industry, and the system in general, are looking perpetually to absorb countercultural movements, to appropriate their symbols in order to sell the "cool" distorted and devoid of any spiritual or dissenting substance. Because on purely materialistic terms this substance is just superficial, or even because it sometimes represents a potential threat to the order and monopolies in place.
We reminisce painfully some past-examples. First the hippie culture, this authentic and spiritually inspired protest that the system has quickly phagocytosed to let then in front of the eyes of the masses a handful of pastiche clichés and a profitable merchandising "made in China". Then, the punk movement. Inherently nihilistic, It had taken over the hippie movement, much like a hangover awaits one who succumbs to the excesses of a joyful festive night. It had erected a new anti-system movement, throwing here and there social and economical alternatives against a backdrop of Thatcherism, unemployment, poverty and social tensions. Finally, the market has sold Punk as a vulgar tag for rebellious teenagers in search of identity, evidenced by the painful beachcomber of American 90's skate-punk wave symbolized among others by Blink 182 and Sum 41.
If there is a psychedelic revolution, then it will be even more interesting to observe its ability to unite solidly and permanently around common values, continually surpassing its pure aesthetic, perpetuating its creative wealth and never ceasing to build a real artistic and musical alternative dissented from the mainstream industrial circuits. Among the initiatives and the interesting things that emerge, beyond the recent global blooming of Psych Fests with great and huge line-up and affordable prices, we note the formation of collectives that weld some actors of the movement: such Nothing or Sons Of Confusion (on which most of the bands have been mentioned in our previous edition of Frenchedelia), the excellent work of independent labels such Cranes Records, Howlin Banana Records or Born Bad Records to name a few, and the organization of psychedelic evenings crossing the local scene with the international one, as examples the Acid Test Party organized by our comrades of Jabberwocky Band in Rouen or the growing enthusiasm around The Psychedelic Revolution launched in Toulouse by the members of Sweet Sound Sound.
The Frenchedelia series thus continues, and we have decided to dedicate it a new format. While the dossier that has marked its genesis was in the form of a cheerful jumble of 61 bands thrown pell-mell together, it will be now organized in the form of smaller and little more structured series of 14 bands .
Without further ado we wish you a good journey through other corners of the sweet psychedelic French underground and we're still sorry not to have had the time to translate the introductions for each band.